Que faut-il penser des commentaires de
Normand Lester, parus le 23 février sur « La chronique de
Normand Lester » et portant le titre « CLASSE, mafia,
FTQ-Construction : l'efficacité de la violence »? Il y a
de quoi se demander si Lester a suivi les événements des dernières
années ou s'il dégèle avec le printemps. J'avais pourtant pris au
sérieux ce journaliste dans le passé et lu attentivement ces
volumes « Le livre noir du Canada ». Mais si ses
recherches historiques reposent sur les mêmes critères d'analyse
que ceux parus dans l'article précité, alors... poubelles, car côté
« autopsie» (ici, un mot qui fait violent) et vérité... on
est loin du compte.
La CLASSE :
un phénomène sociologique
Depuis des années on reproche aux
jeunes de ne pas « agir » d’être « prostré ».
Aujourd’hui qu’ils bougent, comme des jeunes, on leur en fait
reproche… Il y a une façon de bouger à la Lester. On bouge
tranquillement et on espère qu’il se passera quelque chose :
la pensée magique en pleine action. Avec de tels propos, on ne se
questionne plus sur ce qui meuble le quotidien de ceux qui n’ont
rien à dire. De plus, ce ne sont pas seulement les jeunes qui
participent à ce débat, malgré ce qu’en pense Lester, il s’agit
d’un phénomène qui préoccupe l’ensemble de la société. Les
déclarations de groupes engagés sur le sujet en font foi.
L’autre point « fort » de
Lester, c’est d’affirmer que la CLASSE ne reçoit pas d'appuies
venant du monde entier. Pas à dire, très au fait des questions
internationales, monsieur Normand Lester. Mais voilà que cette
affirmation se révèle aussi fausse que les autres. À ce titre,
Ricardo Pétrella qui s’est prononcé clairement et sans ambiguïté
sur la gratuité scolaire universitaire. Doit-il pour autant être
considéré comme « un violent? Eh oui! “Le Monde”, “Al
Jazira”, le “China Post” et le “Paris Match” en parlent,
les articles affluent sur le WEB, les médias de nos voisins du sud
se sont saisis de l’événement. Il est évident que si l’on suit
l’orientation des États-Unis et du reste du Canada conservateur,
l’État n’aurait intervenir ni dans la santé, ni dans
l’éducation. Mais voilà, on est au Québec et il y a longtemps
que nous construisions nos régimes. Lester est-il trop jeune pour
connaître le Rapport Parent? Ne sait-il pas que dans l’orientation
du régime pédagogique, dans son entièreté, on devait en arriver à
la gratuité scolaire jusqu’au niveau universitaire? Ne sait-il pas
que le Québec, en matière de santé et d’éducation, n’a pas
choisi la voie américaine?
Libéraux vs
FTQ-Construction et la CLASSE: un vrai combat.
Dans le même registre, Lester affirme
que la FTQ-Construction et les Libéraux s'entendent “comme larrons
en foire”. Wow! Faut le faire. Je ne sais pas si Lester est reclus
depuis l'élection d'avril 2003 ayant mené au pouvoir les libéraux,
mais jamais la FTQ-construction n'a eu de liaison avec ceux-ci, bien
au contraire. C'est un autre syndicat de la construction qui a une
liaison avec les libéraux, mais Lester ne le sait pas. Comment se
fait-il qu'il ne le sache pas? Son scénario dépasse la fiction.
Lester a-t-il si peu de mémoire qu'il oublie les manifestations de
décembre 2003 aux ports de Montréal, Québec, Trois-Rivières, des
fermetures de routes et d’autres actions menées, notamment par la
FTQ-Construction, contre ce gouvernement libéral qui voulait
faire du Québec un “made in USA” avec nos régimes sociaux.
Lester ne se souvient-il pas de l'opposition au ministre du Travail,
Laurent Lessard? A-t-il oublié le différend entre la
FTQ-construction et un autre ministre du Travail, Sam Hamad en
décembre 2008? Que penser de “l'aimable” relation qu'entretient
actuellement la FTQ-construction avec la ministre du Travail Lise
Thériault? Comment peut-on écrire de telles inepties? Il vit en
vase clos le Normand? Que cherche Lester en écrivant de telles c...
choses? En s’attaquant à ceux qui s'opposent au gouvernement
Charest, ne fait-il pas le jeu de ce dernier? Quoi, Normand Lester en
serait-il rendu a attirer l’attention ailleurs que sur le
gouvernement Charest au moment ou l’on parle de possibles
élections? Dans quel but le ferait-il? Pas de quoi faire de
l’humour.
Qui sont les
victimes?
D'autre part, Lester devrait nous
entretenir des actes de violences commises par la FTQ-construction.
Lesquelles? Les deux représentants poursuivis en justice n’ont-ils
pas été acquittés? S'il n'est pas au courant, le principal “acte
de violence reproché” à l'accusé était d'“avoir fait de
gros yeux”. Méchant acte de violence, non? Posons la question
directement : Lester remet-il en question l'impartialité de la
magistrature? Doit-on comprendre à la lecture de son texte que les
juges sont aussi à la solde des libéraux? Ce sont les juges qu'il
faut critiquer alors, pas la FTQ-Construction. D’autre part,
oubli-t-il que ce sont les entreprises en construction, les bureaux
d'ingénieurs-conseils, les ministres et députées, les maires,les
officines gouvernementales, les services du revenu, voir même les
policiers qui sont poursuivis ou mis sur la sellette, en raison de la
corruption qui sévirait dans l’industrie, et non la
FTQ-Construction. Se souvient-il que c'est au moment où l'on
demandait une enquête sur la Caisse de dépôt et placement du
Québec, qui avait perdu 40 milliards de $, que l'on s'est mis à
parler de la FTQ-construction. On oublie que la Caisse (était-elle
proche des libéraux?) a “encaissé” un double coup qui a fait
chuter le fonds de retraite des travailleurs de la construction de 3
milliards de dollars. Que ce montant n'a toujours pas été
complètement récupéré et que c'est l'industrie qui en assume la
récupération et non la Caisse de dépôt? Peut-on parler ici de
violence? Et là, les libéraux viennent de subtiliser 190 000 000$
de dollars au milieu de la construction en transférant le fonds de
formation professionnelle à la Commission de la construction du
Québec. Un petit cadeau de la ministre du Travail, Lise Thériaul, à
une ex-ministre du Travail péquiste, madame Diane Lemieux. Et c'est
la FTQ-Construction qui fait du copinage avec le gouvernement? Et
Lester prétend que la FTQ-construction est “copain copain” avec
la ministre, celle-là même qui a encouragé les travailleurs et les
travailleuses à quitter la FTQ-Construction. Vraiment, sur le plan
de l'analyse Lester est très fort, trop fort.
Je suis prêt à
parler violence, mais de toutes les violences!
En terminant, si on désire ouvrir un
débat sur la violence, je suis preneur. Nous parlerons de ce que
doivent subir les travailleurs membres de la FTQ Construction et des
autres travailleurs qui œuvrent sur les chantiers. Nous parlerons
des 50 morts à survenir sur les chantiers chaque année. Nous
parlerons des dizaines de milliers de blessées qui arpentent les
centres hospitaliers, cliniques, CLSC, etc. en raison du travail.
Nous parlerons de l'industrie de la construction comme “fabrique
d'handicapées” en raison des lésions professionnelles. Nous
parlerons du quotidien de ces travailleurs : insécurité
physique, insécurité d'emploi et insécurité financière. Nous
parlerons de santé et d'hygiène ou il s'avère impossible, sur la
majorité des chantiers, encore aujourd'hui, de bénéficier
d'installations sanitaires salubres : pas de toilettes ni de
lavabos. Et nous pourrons parler de bien autre chose. Bien assis à
“blogger” au chaud, il est facile de parler de violence, mais à
30 degrés sous zéro l'hiver et à plus 40 l'été, a
construire le Québec, c’est autre chose. La violence possède
de multiples formes et l’on voit celle que l’on veut bien voir et
qui fait vendre bien sûr. Vous désirez parler violence? Mais déjà
vous parlez violence, vous êtes violence. Pour leur part, les
travailleurs de la construction et leurs représentants sont des
pacifiques, des débonnaires, des doux en regard de la situation qui
se perpétuent sur les chantiers en raison des conditions “normales
dans lesquelles s’exécute le travail”. Bien sûr, lorsque l'on
compte 70 000 membres, il peut y avoir ici ou là des dérapages.
Mais, on ne dira pas que l'ensemble du monde journalistique est
pourri parce des membres de cette corporation sont mêlés a des
événements particuliers, il doit en être de même pour l'industrie
de la construction. On fera la part des choses, nous.
FTQ-Construction
et CLASSE
Quant à lier la FTQ-Construction et la
CLASSE, n’est certes pas pour me déplaire. Durant 14 ans j’ai
enseigné à l’Université de Montréal et je dois avouer que ce
milieu est loin d’être désagréable. Le milieu étudiant m'a
toujours paru dynamique, plein de vitalité et savoir de plus qu’au
moment ou je serais à la retraite le monde appartiendra et sera
gouverné par des personnes qui ont le courage d’affronter le
pouvoir politique sans perdre la tête, sans faire de “deal”,
prêt a défendre un projet collectif: alors “Bravo”.
Lester et le
travail facile
En définitive, la violence n'est pas
neutre et elle se détermine. Je ne crois pas que l'industrie de la
construction ou la FTQ-construction représente un attrait quelconque
pour des personnes violentes. Mais le mépris, l'indifférence, la
stupidité et les préjugés eux : oui. En écrivant, ce qu'il
écrit, avant même de s'informer, à moins que ces sources ne
soient, elles-mêmes violentes, Lester par son attitude la détermine.
Il faut avouer que ces jours-ci, parler de mafia, CLASSE, warriors,
Mohawks et FTQ-Construction dans un même texte... il n'y a pas mieux
pour sortir sur un système de recherche avec un minimum d'effort. Et
si de plus on est proche du pouvoir... non... oui? Avec de tels
propos, aller savoir.