dimanche 29 avril 2012

La violence façon Normand Lester

Que faut-il penser des commentaires de Normand Lester, parus le 23 février sur « La chronique de Normand Lester » et portant le titre « CLASSE, mafia, FTQ-Construction : l'efficacité de la violence »? Il y a de quoi se demander si Lester a suivi les événements des dernières années ou s'il dégèle avec le printemps. J'avais pourtant pris au sérieux ce journaliste dans le passé et lu attentivement ces volumes « Le livre noir du Canada ». Mais si ses recherches historiques reposent sur les mêmes critères d'analyse que ceux parus dans l'article précité, alors... poubelles, car côté « autopsie» (ici, un mot qui fait violent) et vérité... on est loin du compte.

La CLASSE : un phénomène sociologique

Depuis des années on reproche aux jeunes de ne pas « agir » d’être « prostré ». Aujourd’hui qu’ils bougent, comme des jeunes, on leur en fait reproche… Il y a une façon de bouger à la Lester. On bouge tranquillement et on espère qu’il se passera quelque chose : la pensée magique en pleine action. Avec de tels propos, on ne se questionne plus sur ce qui meuble le quotidien de ceux qui n’ont rien à dire. De plus, ce ne sont pas seulement les jeunes qui participent à ce débat, malgré ce qu’en pense Lester, il s’agit d’un phénomène qui préoccupe l’ensemble de la société. Les déclarations de groupes engagés sur le sujet en font foi.

L’autre point « fort » de Lester, c’est d’affirmer que la CLASSE ne reçoit pas d'appuies venant du monde entier. Pas à dire, très au fait des questions internationales, monsieur Normand Lester. Mais voilà que cette affirmation se révèle aussi fausse que les autres. À ce titre, Ricardo Pétrella qui s’est prononcé clairement et sans ambiguïté sur la gratuité scolaire universitaire. Doit-il pour autant être considéré comme « un violent? Eh oui! “Le Monde”, “Al Jazira”, le “China Post” et le “Paris Match” en parlent, les articles affluent sur le WEB, les médias de nos voisins du sud se sont saisis de l’événement. Il est évident que si l’on suit l’orientation des États-Unis et du reste du Canada conservateur, l’État n’aurait intervenir ni dans la santé, ni dans l’éducation. Mais voilà, on est au Québec et il y a longtemps que nous construisions nos régimes. Lester est-il trop jeune pour connaître le Rapport Parent? Ne sait-il pas que dans l’orientation du régime pédagogique, dans son entièreté, on devait en arriver à la gratuité scolaire jusqu’au niveau universitaire? Ne sait-il pas que le Québec, en matière de santé et d’éducation, n’a pas choisi la voie américaine?

Libéraux vs FTQ-Construction et la CLASSE: un vrai combat.

Dans le même registre, Lester affirme que la FTQ-Construction et les Libéraux s'entendent “comme larrons en foire”. Wow! Faut le faire. Je ne sais pas si Lester est reclus depuis l'élection d'avril 2003 ayant mené au pouvoir les libéraux, mais jamais la FTQ-construction n'a eu de liaison avec ceux-ci, bien au contraire. C'est un autre syndicat de la construction qui a une liaison avec les libéraux, mais Lester ne le sait pas. Comment se fait-il qu'il ne le sache pas? Son scénario dépasse la fiction. Lester a-t-il si peu de mémoire qu'il oublie les manifestations de décembre 2003 aux ports de Montréal, Québec, Trois-Rivières, des fermetures de routes et d’autres actions menées, notamment par la FTQ-Construction, contre ce gouvernement libéral qui voulait faire du Québec un “made in USA” avec nos régimes sociaux. Lester ne se souvient-il pas de l'opposition au ministre du Travail, Laurent Lessard? A-t-il oublié le différend entre la FTQ-construction et un autre ministre du Travail, Sam Hamad en décembre 2008? Que penser de “l'aimable” relation qu'entretient actuellement la FTQ-construction avec la ministre du Travail Lise Thériault? Comment peut-on écrire de telles inepties? Il vit en vase clos le Normand? Que cherche Lester en écrivant de telles c... choses? En s’attaquant à ceux qui s'opposent au gouvernement Charest, ne fait-il pas le jeu de ce dernier? Quoi, Normand Lester en serait-il rendu a attirer l’attention ailleurs que sur le gouvernement Charest au moment ou l’on parle de possibles élections? Dans quel but le ferait-il? Pas de quoi faire de l’humour.

Qui sont les victimes?

D'autre part, Lester devrait nous entretenir des actes de violences commises par la FTQ-construction. Lesquelles? Les deux représentants poursuivis en justice n’ont-ils pas été acquittés? S'il n'est pas au courant, le principal “acte de violence reproché” à l'accusé était d'“avoir fait de gros yeux”. Méchant acte de violence, non? Posons la question directement : Lester remet-il en question l'impartialité de la magistrature? Doit-on comprendre à la lecture de son texte que les juges sont aussi à la solde des libéraux? Ce sont les juges qu'il faut critiquer alors, pas la FTQ-Construction. D’autre part, oubli-t-il que ce sont les entreprises en construction, les bureaux d'ingénieurs-conseils, les ministres et députées, les maires,les officines gouvernementales, les services du revenu, voir même les policiers qui sont poursuivis ou mis sur la sellette, en raison de la corruption qui sévirait dans l’industrie, et non la FTQ-Construction. Se souvient-il que c'est au moment où l'on demandait une enquête sur la Caisse de dépôt et placement du Québec, qui avait perdu 40 milliards de $, que l'on s'est mis à parler de la FTQ-construction. On oublie que la Caisse (était-elle proche des libéraux?) a “encaissé” un double coup qui a fait chuter le fonds de retraite des travailleurs de la construction de 3 milliards de dollars. Que ce montant n'a toujours pas été complètement récupéré et que c'est l'industrie qui en assume la récupération et non la Caisse de dépôt? Peut-on parler ici de violence? Et là, les libéraux viennent de subtiliser 190 000 000$ de dollars au milieu de la construction en transférant le fonds de formation professionnelle à la Commission de la construction du Québec. Un petit cadeau de la ministre du Travail, Lise Thériaul, à une ex-ministre du Travail péquiste, madame Diane Lemieux. Et c'est la FTQ-Construction qui fait du copinage avec le gouvernement? Et Lester prétend que la FTQ-construction est “copain copain” avec la ministre, celle-là même qui a encouragé les travailleurs et les travailleuses à quitter la FTQ-Construction. Vraiment, sur le plan de l'analyse Lester est très fort, trop fort.

Je suis prêt à parler violence, mais de toutes les violences!

En terminant, si on désire ouvrir un débat sur la violence, je suis preneur. Nous parlerons de ce que doivent subir les travailleurs membres de la FTQ Construction et des autres travailleurs qui œuvrent sur les chantiers. Nous parlerons des 50 morts à survenir sur les chantiers chaque année. Nous parlerons des dizaines de milliers de blessées qui arpentent les centres hospitaliers, cliniques, CLSC, etc. en raison du travail. Nous parlerons de l'industrie de la construction comme “fabrique d'handicapées” en raison des lésions professionnelles. Nous parlerons du quotidien de ces travailleurs : insécurité physique, insécurité d'emploi et insécurité financière. Nous parlerons de santé et d'hygiène ou il s'avère impossible, sur la majorité des chantiers, encore aujourd'hui, de bénéficier d'installations sanitaires salubres : pas de toilettes ni de lavabos. Et nous pourrons parler de bien autre chose. Bien assis à “blogger” au chaud, il est facile de parler de violence, mais à 30 degrés sous zéro l'hiver et à plus 40 l'été, a construire le Québec, c’est autre chose. La violence possède de multiples formes et l’on voit celle que l’on veut bien voir et qui fait vendre bien sûr. Vous désirez parler violence? Mais déjà vous parlez violence, vous êtes violence. Pour leur part, les travailleurs de la construction et leurs représentants sont des pacifiques, des débonnaires, des doux en regard de la situation qui se perpétuent sur les chantiers en raison des conditions “normales dans lesquelles s’exécute le travail”. Bien sûr, lorsque l'on compte 70 000 membres, il peut y avoir ici ou là des dérapages. Mais, on ne dira pas que l'ensemble du monde journalistique est pourri parce des membres de cette corporation sont mêlés a des événements particuliers, il doit en être de même pour l'industrie de la construction. On fera la part des choses, nous.


FTQ-Construction et CLASSE

Quant à lier la FTQ-Construction et la CLASSE, n’est certes pas pour me déplaire. Durant 14 ans j’ai enseigné à l’Université de Montréal et je dois avouer que ce milieu est loin d’être désagréable. Le milieu étudiant m'a toujours paru dynamique, plein de vitalité et savoir de plus qu’au moment ou je serais à la retraite le monde appartiendra et sera gouverné par des personnes qui ont le courage d’affronter le pouvoir politique sans perdre la tête, sans faire de “deal”, prêt a défendre un projet collectif: alors “Bravo”.

Lester et le travail facile

En définitive, la violence n'est pas neutre et elle se détermine. Je ne crois pas que l'industrie de la construction ou la FTQ-construction représente un attrait quelconque pour des personnes violentes. Mais le mépris, l'indifférence, la stupidité et les préjugés eux : oui. En écrivant, ce qu'il écrit, avant même de s'informer, à moins que ces sources ne soient, elles-mêmes violentes, Lester par son attitude la détermine. Il faut avouer que ces jours-ci, parler de mafia, CLASSE, warriors, Mohawks et FTQ-Construction dans un même texte... il n'y a pas mieux pour sortir sur un système de recherche avec un minimum d'effort. Et si de plus on est proche du pouvoir... non... oui? Avec de tels propos, aller savoir.

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